« Il ne savait pas que c’était impossible, alors il l’a fait » – Esaïe 11


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Esaïe 11/1-10

1 Puis un rameau sortira du tronc d’Isaï, Et un rejeton naîtra de ses racines. 2 L’Esprit de l’Éternel reposera sur lui: Esprit de sagesse et d’intelligence, Esprit de conseil et de force, Esprit de connaissance et de crainte de l’Éternel. 3 Il respirera la crainte de l’Éternel; Il ne jugera point sur l’apparence, Il ne prononcera point sur un ouï-dire. 4 Mais il jugera les pauvres avec équité, Et il prononcera avec droiture sur les malheureux de la terre; Il frappera la terre de sa parole comme d’une verge, Et du souffle de ses lèvres il fera mourir le méchant. 5 La justice sera la ceinture de ses flancs, Et la fidélité la ceinture de ses reins. 6 Le loup habitera avec l’agneau, Et la panthère se couchera avec le chevreau; Le veau, le lionceau, et le bétail qu’on engraisse, seront ensemble, Et un petit enfant les conduira. 7 La vache et l’ourse auront un même pâturage, Leurs petits un même gîte; Et le lion, comme le bœuf, mangera de la paille. 8 Le nourrisson s’ébattra sur l’antre de la vipère, Et l’enfant sevré mettra sa main dans la caverne du basilic. 9 Il ne se fera ni tort ni dommage Sur toute ma montagne sainte; Car la terre sera remplie de la connaissance de l’Éternel, Comme le fond de la mer par les eaux qui le couvrent. 10 En ce jour, le rejeton d’Isaï Sera là comme une bannière pour les peuples; Les nations se tourneront vers lui, Et la gloire sera sa demeure.

La paix est-elle vraiment possible ?

Chers frères et sœurs, j’aime bien ces histoires de panthère qui se couche avec le chevreau, du loup qui séjourne avec l’agneau et qu’un jeune homme conduit. Je trouve que c’est le meilleur des contes de Noël possibles. C’est beau comme un conte de Noël version Disney. On se dit : oh ! Oui, c’est cela Noël. Bien sûr que c’est cela. Et puis, une fois que la période des fêtes sera finie on se dit que la vie reprendra son cours normal. Tout rentrera dans l’ordre. Et le loup mangera à nouveau l’agneau.

Franchement, la paix universelle, vous y croyez, vous ?

Moi j’y crois. Justement en raison de ce genre de textes bibliques. Les contes bibliques de Noël, j’y crois, non pas parce que c’est beau ou que cela nous fait rêver, mais parce que c’est vrai. Les contes de Noël disent juste quand ils parlent de la vie.

Prenons un exemple simple : les repas de famille. Il n’y a rien de plus beau qu’un repas de famille. Et pourtant, il n’est pas rare que ça finisse mal, alors que tous les ingrédients étaient réunis pour que ce soit formidable : une belle décoration, un menu de choix, chacun s’est bien habillé, on a envie de faire la fête et de passer un moment de toute beauté. Et pourtant, il arrive que ça se termine mal. Surtout si on se met à parler de la vie, de la vraie vie. Surtout que nous avons actuellement tout ce qu’il faut pour que cela finisse en guerre de tranchée, entre la campagne électorale et la situation sanitaire avec les mesures de protection. Il y a de quoi s’entredévorer.

En fait, il y a toujours de quoi s’entredévorer. C’est ce que le rédacteur biblique sait parfaitement : nous avons tous de bonnes raisons de nous sauter à la gorge comme des bêtes sauvages pour défendre nos convictions, nos croyances, notre façon de voir les choses. Il n’y a rien de plus naturel que l’animosité. Ce qui est contre nature, c’est que ça se passe bien. Ce qui est contre nature, c’est qu’il y ait une véritable écoute des autres et une estime mutuelle.

Et c’est cela que le prophète Esaïe annonce : une situation qui est contre nature, qui va contre le cours naturel des choses. Une situation qui ne se passe pas comme prévu. La venue du Messie, c’est un événement qui fait aller la vie à l’encontre du cours naturel des choses. Les ennemis deviennent des amis – en tout cas vivent en paix les uns avec les autres. La violence n’est plus la règle. C’est la paix qui devient le mode relationnel.

Cette paix universelle, elle n’a rien de naturel. Elle est provoquée par l’arrivée du Messie qui révèle qu’un autre ordre du monde est possible. Il est possible qu’il ne se fasse ni tort ni dommage. Ce n’est pas naturel, mais c’est possible. De la même manière qu’un repas de famille avec tout le monde peut se passer sans heurt ni éclat de voix, sans porte qui claque.

Ce que révèle l’advenue du Messie, c’est que prendre Dieu au sérieux change la vie parce que cela change notre manière d’être les uns avec les autres. Cela change notre manière de penser. Cela change notre manière de nous exprimer.

La foi en Dieu change notre existence parce que lorsque nous nous interrogeons sur la vie, sur ce qui est juste, sur ce qui est bon, nous le faisons en pensant à Dieu, en pensant à ce qui est juste et bon de manière absolue, sans autre considération. Et cela change tout. C’est ce que raconte le prophète Esaïe, en parlant de ce jeune homme qui va au milieu des bêtes sauvages et qui n’a que Dieu comme critère de jugement.

C’est ce texte biblique qui, à mon sens, a inspiré l’auteur anglais Mark Twain le jour où il a écrit : « ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. »

La foi, c’est ce qui nous fait penser en fonction de Dieu et non en fonction de nos hésitations, en fonction de nos barrières mentales, en fonction de nos mauvaises images du monde : par la foi, nous regardons le monde tel qu’il pourrait être et non pas uniquement en fonction de ce qu’il a été jusque là.

Et puis, lorsque nous apprécions les situations en fonction de Dieu, nous les dégageons de leurs contingences. Nous ne réfléchissons pas seulement en fonction de ce qui nous ferait plaisir et nous ne réfléchissons pas seulement en fonction  de ce qui permettrait d’enquiquiner les gens que nous n’aimons pas. En pensant les situations à partir de Dieu, nous les libérons des étreintes du passé et des problèmes du présent. L’Esprit de connaissance et de crainte de l’Éternel prend les situations et les gens pour ce qu’ils sont devant Dieu et non pour l’idée qu’on s’en fait ou les ouï-dire, pour reprendre l’expression du prophète Ésaïe. Oui, on vous a dit qu’untel était un chacal, vous vous imaginez qu’unetelle est une panthère, vous pensez qu’untel est venimeux, mais abordez chacun du point de vue de l’Éternel, c’est-à-dire sans préjugé, sans rancœur, sans être lourds des mauvais moments du passé, et ça change tout. Ce qui était considéré comme impossible devient faisable. Quelqu’un qui était considéré comme insupportable devient fréquentable. C’est ainsi que vécut Jésus, libre des préjugés, libre des qu’en dira-t-on, libre du poids de l’histoire.

Noël, c’est la fraîcheur du nouveau-né qui porte un regard neuf sur les situations, sur les personnes. Noël, c’est l’innocence de l’enfant qui n’a pas été conditionné par le jugement des autres et qui voit tout de manière absolue. Noël, c’est l’esprit de sagesse qui juge avec droiture et qui ne cherche pas le mal, mais qui porte son regard sur ce qui est juste, sur ce qui est désirable, sur ce qui est bon. Noël, c’est connaître à la manière de Dieu : avec un amour inconditionnel ; voilà ce qui rend la paix universelle possible.

Alors, chers enfants, chers jeunes gens, vous avez une responsabilité formidable, c’est de maintenir vivace l’esprit de Noël. Je pense à ce qu’écrivait le poète Louis René des Forêts : « que jamais en vous la voix de l’enfant ne se taise ». C’est vous qui êtes les mieux équipés pour agir avec la liberté du Messie, pour faire preuve de toutes les audaces qui permettent de na pas cantonner la vie à ce qu’elle a toujours été, avec son lot de violence, de rivalité, de vilenie. Nous avons besoin votre regard innocent et émerveillé sur le monde. Nous avons besoin de vos projets les plus fous, les plus audacieux : faites-nous part de ce qui vous trotte dans la tête. C’est que qui nous préparera un avenir absolument radieux.

Votre responsabilité envers les plus anciens, c’est de faire en sorte que jamais, en eux, la voix de l’enfant ne se taise.

Joyeux Noël

Amen

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