Les menaces et la grâce. Psaume 91

Écouter le culte – télécharger

Écouter la prédication – télécharger


Psaume 91

1 Celui qui demeure sous l’abri du Très-Haut Repose à l’ombre du Tout Puissant. 2 Je dis à l’Éternel: Mon refuge et ma forteresse, Mon Dieu en qui je me confie ! 3 Car c’est lui qui te délivre du filet de l’oiseleur, De la peste et de ses ravages. 4 Il te couvrira de ses plumes, Et tu trouveras un refuge sous ses ailes; Sa fidélité est un bouclier et une cuirasse. 5 Tu ne craindras ni l’angoisse de la nuit, ni la flèche qui vole de jour, 6 Ni la peste qui marche dans les ténèbres, Ni la contagion qui frappe en plein midi. 7 Que mille tombent à ton côté, Et dix mille à ta droite, Tu ne seras pas atteint; 8 De tes yeux seulement tu regarderas, Et tu verras la rétribution des méchants. 9 Car tu es mon refuge, ô Éternel ! Tu fais du Très-Haut ta retraite. 10 Aucun malheur ne t’arrivera, Aucun fléau n’approchera de ta tente. 11 Car il ordonnera à ses anges De te garder dans toutes tes voies; 12 Ils te porteront sur les mains, De peur que ton pied ne heurte contre une pierre. 13 Tu marcheras sur le lion et sur l’aspic, Tu fouleras le lionceau et le dragon. 14 Puisqu’il m’aime, je le délivrerai; Je le protégerai, puisqu’il connaît mon nom. 15 Il m’invoquera, et je lui répondrai; Je serai avec lui dans la détresse, Je le délivrerai et je le glorifierai. 16 Je le rassasierai de longs jours, Et je lui ferai voir mon salut.

Chers frères et sœurs, en choisissant ce psaume 91, les parents de Garance ont choisi un psaume qui décrit la vie humaine avec réalisme. C’est là un aspect fondamental de la religion : nous parler de la vie telle qu’elle est vraiment. C’est aussi un psaume qui nous révèle la part que Dieu prend dans cette vie. C’est là l’autre aspect fondamental de la religion : nous parler de la vie telle qu’elle peut être vraiment. Aussi, ce psaume, présente la vie qui est à la fois sous le coup de menaces et au bénéfice de la grâce. Ce sont ces deux pôles que nous allons explorer.

  1. Menaces

La religion ne cherche pas à cacher quoi que ce soit de la dureté de la vie. Au contraire, c’est en mettant en lumière toutes les difficultés que la religion nous prépare à ce qui peut nous arriver, de sorte que nous ne soyons pas effrayés le moment venu et que nous puissions réagir de la meilleure manière qui soit, sans être justement soumis à la peur qui paralyse et qui fait faire de mauvais choix.

Le psalmiste repère trois types de menaces : la maladie (quand il parle de la peste, de la contagion), l’angoisse (quand il parle de la terreur de la nuit) et l’opposition (quand il parle des pierres qui pourraient nous faire tomber, des ennemis qui tirent des flèches, qui emprisonnent dans le filet ou de ceux qui sont décrits sous la figure des bêtes sauvages que sont le lion, le serpent aspic et le dragon).

Je pourrais développer chaque menace, les détailler, décrire leurs causes, dire plus précisément le mal qu’elles peuvent nous faire. Je me contenterais de commenter ces trois types de menaces en constatant que le regard que les auteurs bibliques portent sur la vie n’est pas aveuglé par la foi. La foi ne nous cache pas la dureté de l’existence. La foi nous permet de regarder la vie en face, sans baisser le regard, sans se cacher la face. La foi n’est pas un moyen d’échapper au mal. Ce n’est pas non plus un moyen de justifier le mal, en l’expliquant et, ce faisant, en lui donnant une raison d’être.

Les rédacteurs bibliques nous rappellent que la vie quotidienne n’est pas exempte de difficultés. Ce constat est un encouragement à ne pas être passifs. Être passif, c’est laisser faire les choses. Être passif, c’est laisser le mal prendre de la place, c’est laisser ce qui fait mal structurer le monde. Quand je parle du mal, je ne veux pas faire entendre que le mal aurait une forme de consistance, qu’il y aurait une source du mal qui serait localisable, ou un être surnaturel, peut-être un équivalent du Dieu de Jésus-Christ, mais dans sa version négative, qui serait l’auteur de tout ce qui relève du mal. En parlant du mal, je pense que nous pouvons tout simplement convenir que le mal, c’est ce qui fait mal. Et les trois types de menaces touchent trois aspects de notre personne : notre corps peut avoir mal. Notre esprit peut avoir mal. Notre spiritualité peut avoir mal. Les différentes menaces relevées dans ce psaume disent cela : nous pouvons avoir mal dans différents aspects de notre vie que la Bible désigne par le corps, l’esprit et l’âme.

Ce psaume nous rend attentifs au fait que nous pouvons avoir mal dans notre corps, et que le mal qui touche notre esprit ou notre âme ne sont pas moins douloureux et pas moins graves. Notre esprit et notre âme méritent que nous soyons vigilants, que nous ne soyons pas être passifs, que nous ne nous laissions pas faire quand l’une de ces dimensions de la vie est mal en point. C’est la raison pour laquelle il est aussi question de grâce.

  1. La grâce

La grâce, c’est ce qui arrive dans notre histoire personnelle et qui trouve son origine en Dieu. C’est ce qui nous arrive et qui correspond à ce que la Bible dit au sujet de Dieu. Dans notre psaume, la grâce s’observe de deux manières, qui sont deux images de Dieu.

Tout d’abord, Dieu apparaît comme une mère poule. Ce n’est pas tout à fait comme cela que j’ai l’habitude de vous parler de Dieu, mais l’honnêteté m’oblige à constater que ce psaume parle de Dieu comme d’une poule qui protège ses poussins. Le verset 4 précise : « il te couvrira de ses plumes et tu trouveras un refuge sous ses ailes ». En fait, le rédacteur devait plutôt penser aux chérubins qui étaient sur l’arche d’alliance, le trône de Dieu qui était dans le temple de Jérusalem. Ce psaume est un psaume de pèlerinage qui était la liturgie au temple : le croyant arrivait au temple et recevait la bénédiction d’un prêtre et une promesse de Dieu lui-même (1-8), ensuite il y avait une confession de foi du pèlerin (v. 9) et enfin, au moment du départ du temple, il y avait à nouveau une bénédiction du prêtre et une promesse de Dieu (10-16).

C’est donc l’image de cet animal ailé, le chérubin qui est sur l’arche d’alliance, qui a dû inspirer cette image de Dieu qui protège. Cette protection n’est pas une immunité contre les problèmes. Certes, le psaume donne l’impression que le croyant sera toujours à distance des problèmes. En fait, il ne s’agit pas de penser que le croyant soit immunisé contre les épreuves. Il s’agit de comprendre que le croyant pourra toujours trouver un refuge où il pourra recevoir ce qui lui permettra de surmonter les épreuves. La grâce c’est que l’amour de Dieu ne nous fait pas défaut, même lorsque nous sommes malmenés, lorsque nous rencontrons de l’hostilité. Même dans ces situations, Dieu est encore avec nous. La théologie chrétienne qui est une théologie de l’incarnation, précise que cette protection divine s’incarne dans le soin protecteur que nous prodigue le prochain qui croise notre route (bon samaritain), ou, en ce qui te concerne, Garance, qui s’incarne dans l’amour de tes parents, de ton parrain et de ta marraine, de cette communauté qui t’entoure en ce jour.

L’autre image de Dieu que construit ce psaume, c’est celle de l’ange, du messager. Quand le psalmiste dit que Dieu enverra ses anges (v.11), c’est une manière de dire que Dieu est tel un ange, un messager, qui nous permet de découvrir ce que nous ne savons pas encore pour conduire notre vie. Il ne s’agit pas d’imaginer les anges comme des êtres moitié humains et moitié divins. L’ange, c’est une façon d’être de Dieu. L’ange, le messager, nous permet d’en savoir plus, d’être plus éduqués, et donc d’aborder plus facilement les différentes étapes de notre vie. Dire que Dieu envoie des messagers pour nous permettre de ne pas trébucher, c’est dire que l’altérité est indispensable dans notre vie pour ne pas nous écrouler, pour ne pas nous anéantir.

C’est par l’éducation que nous découvrons ce qui est positif ou négatif, dans la vie. C’est par l’éducation que nous découvrons ce qui nous permet d’avancer ou ce qui nous bloque, voire ce qui nous fait chuter. C’est ainsi que Dieu peut nous éviter d’heurter une pierre et de chuter : non pas en nous attrapant par la main et en nous transportant par-dessus les dangers (Jésus l’a bien compris, lui qui ne cède pas à la tentation d’échapper à la loi de gravitation, pendant son séjour au désert), mais en nous ouvrant les yeux sur la nature profonde de ce qui nous entoure. On domine les dangers en les identifiant et en ayant connaissance de nos ressources pour faire face à ce qui nous arrive.

C’est là aussi une grâce qui nous est faite : être éduqué, c’est-à-dire être conduit hors de (e-ducare) ce que nous savons déjà et qui est très insuffisant pour pouvoir réagir efficacement à ce qui survient. L’altérité est ce qui nous sauve de la disparition, c’est ce qui nous délivre des pensées étroites qui nous empêchent d’évoluer dans le monde complexe où nous trouvons.

C’est ainsi, frères et sœurs, que la foi chrétienne nous équipe de telle manière que nous puissions réagir à ce qui nous arrive en retrouvant la confiance nécessaire dans ce Dieu qui protège, et l’intelligence des situations, dans ce Dieu qui éduque.

Amen

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.